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Lionel Hudson : Poursuite vers Gao

mardi 3 mai 2022, par Denis Blaizot

Auteur : Lionel Hudson

Titre français : Poursuite vers Gao

Éditeur : L’arabesque (Coll. Espionnage)

Année de parution : 1957 1957

Quatrième de couverture :

A Dakar, le chef d’un réseau d’espionnage, payé par l’Égypte, commerçant syrien, esclavagiste et marlou à ses heures, tue un missionnaire et commet l’imprudence de kidnapper une jeune Américaine.

La D.S.T. française s’en mêle. Coups de feu, trahisons. Fuite en Jeep sur les pistes du Soudan.

Chaleur et odeurs d’Afrique, lions et moustiques, amour et violences...
Coiffera-t-on la bande sur la frontière du Tibesti ?

Mon avis : Seul roman d’espionnage écrit par Pierre Pairault (1922 1922 -2003 2003 ) alias Stefan Wul Stefan Wul Stefan Wul est le pseudonyme de Pierre Pairault (1922 - 2003).
Déjà tenté par l’écriture pendant ses années de lycée, il suit les conseils de son père et devient Chirurgien-dentiste. Mais dans les années 50, le démon de la littérature le reprend. Et c’est une remarque de sa femme — a-t-il dit dans un entretien — qui l’oriente vers la SF.
et publié sous le pseudonyme de Lionel Husdon (à différencier de Lionel Hudson, né en 1916 et décédé en 2001 2001 , auteur de Rats on Rangoon et Dingoes Dont Bark.). Hé oui ! Poursuite vers Gao est un roman d’espionnage — je pense qu’aujourd’hui on le classerait plutôt thriller — écrit par l’auteur de Niourk, Oms en série, etc.

Je suis déçu, déçu qu’il n’en ait écrit qu’un. En effet, je trouve son style plus adulte que pour la plus part de ses romans de SF... sauf La mort vivante. Je n’ai pas encore tout lu, alors peut-être y a-t-il un ou deux romans signés Stefan Wul Stefan Wul Stefan Wul est le pseudonyme de Pierre Pairault (1922 - 2003).
Déjà tenté par l’écriture pendant ses années de lycée, il suit les conseils de son père et devient Chirurgien-dentiste. Mais dans les années 50, le démon de la littérature le reprend. Et c’est une remarque de sa femme — a-t-il dit dans un entretien — qui l’oriente vers la SF.
dont le style s’approche de celui de ce roman.

Je disais donc : ce roman a été publié dans une collection dite « espionnage » mais vu la trame, je pense qu’en 2022 2022 on le classerait plutôt thriller. Pourquoi ? Parce que le côté espionnage est très ténu et que la trame est plutôt celle d’un polar Noir. Tiens ! à propos de noir. Certains lecteurs ont du comme moi remarquer que dans beaucoup de ses romans, les races autochtones des planètes colonisées par l’humanité ont un langage très « petit nègre » dignes des meilleures répliques de Tintin au Congo. Dans Poursuite vers Gao, au contraire, les héros noirs parlent un français des plus policé, ont fait des études poussées en métropole, etc. L’un d’eux est d’ailleurs docteur Es lettres.

En bref : Des rebondissements bien amenés, un pourri vraiment pourri (et ça ne lui réussi pas spécialement), une affaire d’esclavagisme internationale (d’où le côté espionnage du roman), j’ai tout simplement adoré.

Pour finir, il est sans doute difficile de le trouver à un prix raisonnable, car il n’a pas été réédité depuis sa sortie en 1957 1957 . À moins qu’il n’ait été intégré à l’intégrale de Stefan Wul Stefan Wul Stefan Wul est le pseudonyme de Pierre Pairault (1922 - 2003).
Déjà tenté par l’écriture pendant ses années de lycée, il suit les conseils de son père et devient Chirurgien-dentiste. Mais dans les années 50, le démon de la littérature le reprend. Et c’est une remarque de sa femme — a-t-il dit dans un entretien — qui l’oriente vers la SF.
, mais je ni crois pas trop.

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Quelques extraits :

— Regarde, dit Marc, regarde ces types, sur la pirogue !
—  Où ça ?
—  Là, cette pirogue qui descend le courant. Ils en mettent un coup, les gars !
Eugène plissa les yeux.
—  C’est des Bozos, dit-il. Y a rien de tel que ces frères-là pour manier une pirogue ! Je me demande ce qu’ils foutent par ici, d’habitude ils ne remontent pas le fleuve aussi loin… Y’en a un autre sous le toit de paille, au milieu, on l’voit pas bien. Non, c’est un Peuhl !
Ricochant sur le plat des eaux, les sons portaient jusqu’aux deux hommes.
—  Qu’est-ce qu’ils chantent ? dit Marc.
—  Goussoum nouk eye, gossoum nouk… Ça veut dire : chair tendre, chair fraîche.
Marc ricana :
—  Ils sont cannibales ?
—  Le Bozo, mon pote, ça bouffe surtout du poisson ; j’crois plutôt qu’ils répètent un refrain entendu dans un tam-tam du coin. Ça s’rait plutôt le dialecte du Haut-Niger ; autant que j’comprenne leur langage d’abrutis… Félix qui potuit rerum cognoscere causas.
—  Quoi ?
—  C’est du latin, dit Tamba, ça veut dire : heureux le mec qu’entrave le fond des choses. C’est de Virgile. Allez, amène-toi, tu m’donnes soif.
Le noir ricana.
—  La gazelle blonde ! Un appât de première ! Tu t’rends compte, si on l’pique avec ça, tu t’rends compte du ramdam ! Une Ricaine, ça vaut encore mieux que Mohamedou comme témoin, qu’est-ct’en dis, bouffi. Y vont en baver des ronds de chapeau à l’O.N.U. !
Marc regarda le chauffeur de taxi :
—  Tu parles toujours comme ça ?
—  Ouais mon pote ! À cause… ?
—  Pourquoi fais-tu exprès de parler comme un voyou ?
Le noir rigola.
—  Pas’que ça m’amuse. J’trouve ça pittoresque !
« Le contraire du barman Mamadou », pensa Marc.
—  Et puis pasque j’peux me le permettre, dit le noir, je suis docteur ès lettres. Alors, on peut pas me chambrer.
— Deux whiskies, Mamadou !
Mamadou, en veste blanche et visage noir, sourit de toutes ses dents, en posant les verres sur le marbre.
—  M. Pillaux a toujours grand’soif.
Pillaux tourna vers Marc un visage désabusé.
—  Faites pas attention, dit-il, ce gars-là se croit toujours obligé de parler français comme le Petit Larousse Illustré. Pas vrai, Mamadou ?
Mamadou prit une mine très sérieuse.
—  Il est vrai que je me plais à parler un langage châtié, M. Pillaux.
Pillaux eut un petit coup d’œil vers Marc, un coup d’œil qui disait : « Vous vous rendez compte ! » Il tint devant sa bouche un imaginaire pissenlit et souffla dans le vide.
—  Je sème à tout vent, fit-il d’un ton précieux.
Sioufy lui fit une petite grimace sympathique et s’en alla.
Il enfila un couloir et monta un étage, ouvrit une porte et sourit à Ahmed qui fumait tranquillement sur un canapé.
—  Eh bien, dit le Syrien, le moment est venu de régler nos petits comptes, Ahmed ben Khaleb.
Le Maure inclina en silence sa tête alourdie d’un turban noir à la mode Kounta.
—  Je t’ai montré l’Américaine, continua le Syrien. Elle te plaît toujours ?
Nouvelle inclinaison de tête.
—  Eh bien ?
Ahmed écrasa sans se presser son mégot dans un cendrier et releva largement ses épaisseurs de vêtements. Il en tira un sac de cuir décoré de losanges et d’étoiles. Il ouvrit le sac et y prit des liasses de billets. L’œil du Syrien étincela.
Le Maure compta soigneusement les coupures, sans se presser : un, deux, trois… par billets de cinq mille francs. Il les posait au fur et à mesure sur le parquet. Le tas grossissait. Quand il totalisa un million, le Maure commença un second tas, puis un troisième. L’opération dura une bonne demi-heure.
Sioufy ramassa l’argent et dit :
—  Très bien. Et le petit cadeau ?
Ahmed joua l’étonné :
—  Quel cadeau ?
—  Tu sais bien, le saphir.
—  Je ne l’ai plus, dit le Maure de sa voix râpeuse en cachant ses mains dans ses manches.
Sioufy se hérissa comme un chat en colère.
—  Salaud, cracha-t-il, tu l’avais promis !
Il saisit Ahmed à la gorge et le lâcha aussitôt, l’écume aux lèvres, le regard exorbité. Ahmed n’avait pas paru bouger, mais il tenait un poignard sanglant à la main, un poignard à lame courbe. Il regarda calmement le Syrien s’effondrer à ses pieds.